En 2008, Françoise Hardy et Thomas Dutronc discutent ensemble à
l'instigation des sœurs Massenet qui retranscrivent la rencontre dans un
chapitre de leur livre "
Mères et fils".
Thomas : On te charriait beaucoup. C'est vrai que tu étais quand
même pas mal bouc émissaire dans la maison, mine de rien. Moi, je criais
: "J'ai faim !" - ou :
"I am hungry !"
Françoise : J'étais dans la cuisine et, du premier étage, j'entendais : "Maman,
hungry !" (Elle éclate de rire.).
Thomas : J'étais un peu dictateur. Elle m'apportait des plateaux-repas ou des quatre-heures.
Françoise : Le matin, pour son petit-déjeuner, il mangeait des
carottes crues. Le matin ! Ce n'est pas moi qui voulais ça, c'était lui.
Un lapin !
Thomas : Je me rappelle une année où, tout à coup, un matin, tu
m'avais fait des petites bouchées de pain au fromage. J'aimais bien le
pont-l’évêque. Tu m'enlevais aussi la peau des raisins.
Françoise : Ah oui, le pire, c'est ça ! Il fallait lui enlever
tous les pépins des pastèques ; il fallait aussi lui enlever la peau des
raisins. Tout petit déjà, j'ai eu très à cœur de le nourrir
correctement. j'ai toujours eu des connaissances en diététique, enfin...
plus ou moins valables. Comme je voyais que ses grands-parents
mangeaient beaucoup de charcuterie, je leur interdisais de lui donner
des rillettes. Naturellement, ses grands-parents le bourraient de
rillettes dès qu'il était avec eux !
Thomas : Ce n'est pas qu'elle interdisait de me donner des
rillettes. C'est qu'ils me donnaient des rillettes. C'est qu'ils me
donnaient des rillettes, et moi je disais : "Mmmm, c'est bon." On
faisait les courses ensemble et ils me disaient : "Non, il ne faut pas
de rillettes." Et moi : " Si, allez ! ". Maman est mère poule, elle
n'arrête pas de me couvrir de conseils en diététique et en hygiène de
vie. Elle m'envoie des mails, des trucs qui sont sympathiques. Je ne les
lis pas forcément, mais ça fait plaisir quand même. Le problème, c'est
que "trop d'infos tuent l'info". Tu lis tellement de trucs que
maintenant la manière de te nourrir est complètement abstraite.
Françoise : Oh, ça n'est pas mal quand même ! Tu as mal mangé à midi ?
Thomas : Non, mais je veux dire que ta nourriture est très étrange.
Françoise : Là, on a mangé la même chose.
Thomas : Mais le matin, tu manges des farines.
Françoise : Ah, mais non ! Le matin, je mange des flocons d'épeautre !