vendredi 23 mars 2012

Françoise Hardy et Thomas Dutronc dans Mères et fils (5ème partie)

En 2008, Françoise Hardy et Thomas Dutronc discutent ensemble à l'instigation des sœurs Massenet qui retranscrivent la rencontre dans un chapitre de leur livre "Mères et fils".

Françoise : Le bus ? Tu prenais le bus pour revenir de l'école ? C'est curieux... Alors là, il y a vraiment des choses dont on ne souvient pas.

Thomas : Si, si. Et après, je rentrais en rollers ou à pied. Mais j'étais plus grand. Ça faisait chic de ne pas prendre le bus, je ne sais pas pourquoi. Le samedi, je voyais beaucoup mes grands-parents, toujours. Beaucoup plus tard, quand j'avais quinze, seize ans, mon père venait déjeuner avec nous le dimanche midi. Et le dimanche soir, on était toujours tous les trois, on regardait des films, souvent des Maigret, et on s’endormait devant !

Françoise (Elle rit) : Je n'avais aucune envie de voir ce genre de chose et ton père et toi vous endormiez instantanément !

Thomas : Pendant deux ans d'affilée, on n'a jamais vu un seul épisode jusqu’à la fin. Mon père s'endormait au bout de dix minutes, moi au bout de quarante, et toi dix minutes avant la fin ! (Rires.) C'était marrant.

Thomas Dutronc et Françoise Hardy

Françoise : Je n'ai pas changé... Quand je regarde la télévision le soir, boum !

Thomas : Comme on avait une grande maison, j'ai eu mon espace de liberté assez rapidement. J'avais beaucoup de copains. J'étais un peu chef de bande parce que chez moi on pouvait boire des bières... Mes parents étaient très permissifs. Du moment que je travaillais bien à l'école, en gros, tout m'était permis. Du coup, à la maison, il y avait toujours beaucoup d'amis, j'avais beaucoup de jouets : j'avais, d'un côté, ma mère qui était très économe ("un sou est un sou"), alors je n'avais pas beaucoup d'argent de poche...

Françoise : Enfin, ce n'était pas une question d'économie, c'est parce qu'on voulait t'inculquer certaines valeurs !

Thomas : Alors que mon père, lui, arrivait de temps en temps avec des billets de 500 francs et il m'en donnait un. Moi, j'étais content. Donc j'avais un peu les deux. Je n'étais pas pourri gâté.

mardi 20 mars 2012

Françoise Hardy par François Jouffa (2ème partie)

En 1994, François Jouffa publiait le livre Vinyl Fraise dans lequel il passait en revue les années 60. Découvrons sa présentation de Françoise Hardy

Un an plus tard [mars 1961], Françoise lit une petite annonce dans France Soir : on auditionne de nouveaux talents chez Pathé Marconi. Aux studios de Boulogne de cette firme, elle interprète quelques couplets de Tous les garçons et les filles qui n'intéressent pas le directeur artistique. Obstinée, en mai 61, elle se rend chez Vogue, mais ne parvient toujours pas à enregistrer sa chanson. On lui conseille d'apprendre le solfège et de revenir plus tard. Elle s'y décide en octobre. En février 1962, chantant enfin en mesure, elle prépare son disque chez Vogue, et quatre titres sont enregistrés au mois d'avril, pendant qu'Anne Sylvestre obtient le Prix de l'Académie de la Chanson française. Françoise Hardy va être rapidement encensée par la presse adulte, ne serait-ce que par ce qu'elle va à contre-courant de la vogue twist. C'est une étudiante de 18 ans, qui vit avec sa maman et sa grande sœur. Elle fréquente la faculté et a très peur des garçons.

Mireille - Françoise Hardy et sa mère  - Marie-Josée Neuville

La douce et timide Françoise avoue : "La première fois que je suis sortie, j'étais en Sorbonne. Je fréquentais le Petit Conservatoire de Mireille. J'ai eu envie de faire un disque. J'ai appelé toutes les maisons ; mais on me reprochait toujours de ressembler à Marie-Josée Neuville, parce que je chantais avec ma guitare. J'écrivais tous les jours une chanson : elles étaient épouvantables. Un directeur artistique m'a rappelée au moment où je partais, m'a fait écouter ma voix qu'il venait d'enregistrer, et qui ne passait pas si mal. II m'a fait apprendre 24 000 baisers. Je ne savais pas chanter en mesure. L'accordéoniste Aimable, pour m'aider, a tenté de m’accompagner avec son piano à bretelles pour que j'arrive à chanter à peu près correctement. Le directeur artistique m'a dit que le rock and roll était très aléatoire, et que je ferais mieux de poursuivre mes études."

samedi 17 mars 2012

Françoise Hardy par Jean-Eric Perrin (3ème partie)

En 1988, Jean-Eric Perrin rencontrait Françoise Hardy à l'occasion de la sortie de l'album Décalages. Sa chronique est parue légèrement remaniée à l'intérieur du livre "J'ai encore esquinté mon vernis en jouant un ré sur ma Gibson" en mai 2009.

Françoise Hardy, la femme, ne faisait rien pour satisfaire les fantasmes de star quelle avait fait naître, en grande partie au moment de l’album du même nom, en 1977. L’année du punk, elle chantait du Jonasz et du Sheller. Et on ne lui en voulait pas. L’année d’après, en 78, elle écoutait de la musique saoule, et pour parfaire notre état d'ébriété, publiait Gin Tonic en 80, avec sa pochette sexy où la liane qui fit tomber raide d’amour Dylan, les Stones et une bonne partie de la planète mâle dans les sixties, se recroquevillait dans un frigo, à côté d’une paire d’escarpins à talons aiguilles, parfaite allégorie de ces eighties commençantes, qui seraient plastiques et publicitaires. D’ailleurs c'était la boite de Thierry Ardisson qui avait signé cette image. Elle enchaînera avec A Suivre, un disque avec Louis Chédid, puis le prémonitoire Quelqu’un qui s'en va, en 1982, avant ces six années d’absence choisie.

Françoise Hardy - Billie Holiday

Un vrai cauchemar de fan que ces absences, et puis ce côté popote, ses impossibles casquettes Groovies qu’elle s'obstinait à porter à la télévision, sa dévorante passion pour une science aussi peu rock'n roll que l'astrologie, son perpétuel dénigrement d'elle-même, de la chanson, ce dilettantisme forcené... On voulait quelle soit à la face du monde la plus grande, et elle ne faisait rien que se tromper ! Sans parler de ses positions politiques, quelle prenait le risque d’afficher à l’inverse de celles qui sont courantes dans la profession.
C’est vrai quoi, on la voulait triomphante, impériale, à défaut d’être beautiful loseuse. Billie Holiday, au moins, avait de vrais défauts qui la rendaient inoubliable : négresse, pute, junkie, perdante et tellement divine quand, un camélia derrière l’oreille, elle ouvrait la bouche comme le chemin du purgatoire...
La voix de Françoise Hardy procure le même sentiment d'attachement que celle, pourtant opposée, de Billie Holiday : on s'interroge souvent sur le sexe des anges, mais on sait qu'ils ne peuvent avoir qu'une voix : la sienne. C'est une responsabilité qu'elle a toujours refusée, ne voulant être qu'une femme ordinaire, et comble du vice, y réussissant.

mardi 13 mars 2012

La discographie des années 60 en 45 tours (année 1967)

Suite de la saga des 45 tours français des années 60 de Françoise Hardy.

Époque : 1967 !
Françoise assume son statut de globe-trotter avec rien moins que 73 récitals en un trimestre (dont certains au cœur du Moyen Orient !) après avoir scandalisé la prude Albion en portant un costume Yves Saint Laurent lors d'une série de spectacles à l'hôtel Savoy de Londres.

Alors que "Grand Prix" étale sur grand écran son sex-appeal mini-jupé , Françoise s'émancipe de Vogue en créant sa maison de production Asparagus.

Après une série de galas au Canada avec Udo Jurgens, c'est l'éclosion d'une idylle romantique avec Jacques Dutronc. Le cœur est au beau fixe….

Avec cet emploi du temps sans pause, il devient difficile pour Françoise Hardy d'écrire et d'enregistrer des chansons !

1967
juin novembre


L'attente des fans est récompensée en juin par la sortie d'un excellent 45 tours (Voilà, Au fond du rêve doré, Qui peut dire ?, Les petits garçons).

Novembre est encore plus fantastique avec des pépites éparpillées sur deux EP et un album. Les 45 tours comportent les titres : Des ronds dans l'eau, En vous aimant bien, Viens là, Mon amour adieu pour l'un et Ma jeunesse fout l'camp, Mais il y a des soirs, Il n’y a pas d’amour heureux, C’était charmant pour l'autre.

L'album, reprend l'intégralité des titres des deux 45 tours auxquels sont ajoutés deux titres sélectionnés sur l'EP de juin (Voilà et Qui peut dire ?) ainsi que deux inédits (Il est trop loin, La fin de l'été).

A peine le temps de savourer une pause, la vie itinérante reprend son cours tourbillonnant !

samedi 10 mars 2012

Françoise Hardy parle cinéma pour Première (2ème partie)

Pour le numéro de Septembre 1990, le magazine Première donnait la parole à Françoise Hardy pour qu'elle donne son avis sur quelques films d'hier et d'aujourd'hui.

Plein soleil de René Clément (1960)
René Clément fait partie des rares réalisateurs français que je trouve intéressants. C'est le genre de cinéma qui me plaît. Et puis, je suis très sensible à la beauté : alors quand le film est beau et quand, dans ce film, il y a trois acteurs qui sont presque aussi beaux les uns que les autres... Alain Delon dans "Plein soleil", il dépasse tout. Il est... extraordinaire. Pas aussi bon comédien qu'il l'est devenu par la suite, mais d'une beauté absolument confondante.

Alain Delon - Jacques Dutronc

Sale rêveur de Jean-Marie Périer (1978)
C'est le film où Jacques [Dutronc] est comme Alain Delon dans "Plein soleil". Je veux dire que, de la manière dont Jean-Marie l'a filmé, il est à tomber à la renverse... Finalement, ce que je recherche dans un film, c'est ça : voir un acteur ou une actrice qui est tellement fabuleux qu'on a l’impression qu'il ou elle vient d'une autre planète.

mardi 6 mars 2012

Françoise Hardy & Alain Chamfort dans le Figaro Magazine (2e extrait)

En décembre 2005, Françoise Hardy et Alain Chamfort étaient réunis pour une interview commune dans les colonnes du Figaro Magazine.

Le Figaro Magazine : "Vous n'êtes pas des chanteurs engagés. Est-ce une pose ou de l'indifférence ?"

Françoise Hardy : "On peut écrire un nombre incalculable de chansons d'amour. Les autres thèmes ne peuvent se décliner autant. Il y a une chanson, Respire (du groupe Mickey 3D, NDLR), qui parle très bien d'écologie. C'est difficile d'en faire autant derrière ça."

Alain Chamfort : "Ça ne me viendrait pas à l’idée de faire une chanson sur la pollution ! Certains chanteurs ont besoin d'être concernés par les événements du monde et veulent le démontrer. Cela sous-entend dans leur esprit une générosité. Or, on peut être solidaire sans vouloir donner de leçons. J'ai l'impression que Françoise et moi évitons de tomber dans les thèmes fédérateurs. Nous parlons plutôt de l'intime et de l'affectif."

Françoise Hardy et Alain Chamfort

Le Figaro Magazine : "Un même désenchantement semble vous habiter..."

Alain Chamfort : "Je pense qu'à un moment donné, nos chansons finissent par se matérialiser dans nos vies."

Françoise Hardy : "Quand j'étais enfant, deux contes me touchaient particulièrement : la Petite Sirène et la Dame au blanc visage, deux histoires d'inaccessibilité, de sacrifice et de renoncement. Dès qu'on est en âge de lire, on est attiré par les histoires qui expriment la problématique inconsciente _ masochiste en l’occurrence - qui est en soi."

samedi 3 mars 2012

Françoise Hardy et Thomas Dutronc dans Mères et fils (4ème partie)

En 2008, Françoise Hardy et Thomas Dutronc discutent ensemble à l'instigation des sœurs Massenet qui retranscrivent la rencontre dans un chapitre de leur livre "Mères et fils".

Thomas : J'ai beaucoup souffert de l'astrologie. Avoir des parents célèbres, c'est franchement super, mais avoir un parent astrologue, c'est un vrai problème en revanche ! (Rires.) Non, je dis ça pour rire, mais c'est vrai qu'on a tous nos filtres de compréhension des choses. A partir du moment où tu en viens au filtre astrologique, la discussion est close. C'est un peu hermétique...

Françoise : Donc, je m'étais dit qu'il fallait le mettre à l'école dès que possible, qu'il serait ravi avec d'autres enfants, mais il n'a jamais voulu ! Finalement, il est allé à l'école comme tout le monde, à cinq ans. Au départ, je voulais l'envoyer dans une école différente. Je ne voulais pas d'une école conventionnelle. J'ai essayé l'école bilingue, mais j'ai trouvé les locaux tellement exigus que je me suis dit : "Je ne peux pas le mettre là-dedans." J'ai regretté après, d'ailleurs. Je voulais qu'il parle anglais couramment. Ça facilite la vie de parler deux langues couramment.

Thomas Dutronc enfant

Moi je baragouine, je ne comprends rien, c'est un supplice pour moi quand je suis avec un Anglais parce que les Anglais ont pour habitude de vous parler comme si tout le monde parlait couramment leur langue. Au début, on les reprend pour essayer de comprendre, et puis au bout d'un moment, on renonce à leur demander parce que blablabla... Ils ne se soucient pas du tout de votre degré de compréhension. (Elle rit.) On a des conversations qui sont des monologues, des dialogues de sourds complets ! On ne comprend rien : "Oh yes, yes, indeed !".

Thomas : Finalement, je suis rentré au collège Sévigné à l'âge de six ans et je n'en suis jamais ressorti. Tu m'emmenais tous les matins à l'école.

Françoise : Oui. Ta grand-mère allait te chercher et moi aussi.

Thomas : Après, j'ai pris le bus en sixième..

Françoise : Le bus ? Tu prenais le bus pour revenir de l'école ? C'est curieux... Alors là, il y a vraiment des choses dont on ne souvient pas.