dimanche 6 mai 2018

Françoise Hardy dans The Observer (2ème extrait)



Hardy a connu la gloire au milieu des années 1960 avec un premier single vendu à un million d'exemplaires, Tous les garçons et les filles, une chanson dont le refrain, selon moi, a cette sonorité lyrique qu'elle apprécie tant. "Oh non!" s'exclame-t-elle, me regardant momentanément horrifiée. "J'étais si jeune alors et non instruite. Je ne savais rien de tout ça. Absolument rien. Certaines de ces premières chansons sont terribles. A cette époque, la sophistication musicale était vraiment très loin de mon esprit. "Néanmoins, les singles à succès ont afflué tout au long de la décennie, elle a publié une douzaine d'albums à succès en  France, et son visage est apparu à la une de Paris Match et d'autres magazines si régulièrement qu'elle est devenue la cover-girl française des années 1960.

Cinquante ans plus tard, elle dégage toujours une élégance typiquement française. Elle est vêtue d'un simple T-shirt noir et d'une veste noire sur un jean bleu foncé. Sa frange caractéristique et ses longs cheveux ont depuis longtemps cédé la place à une coiffure chic et blanche comme neige, et un foulard de soie cramoisi fait contraste avec sa peau pâle d'ivoire. Il y a chez elle un calme palpable et peut-être spirituel - en réponse à ma main tendue, elle répond par une salutation zen, les mains jointes comme dans la prière. C'est une survivante à plus d'un titre, après une longue bataille contre le lymphome qui, il y a quatre ans, l'a amenée à l'hôpital dans le coma après une chute. Sa vie resta en suspens pendant plusieurs semaines jusqu'à ce que, avec la permission de son fils, les médecins fassent l'essai d'un nouveau type de chimiothérapie. L'année dernière, dans une interview télévisée, elle a parlé de sa guérison presque miraculeuse avec des sentiments mitigés: « Je regrettais de me réveiller parce que j'avais presque la mort dont je rêvais. Donc la question que je me posais quand je me suis réveillé était : "Pourquoi ce sursis ?"

Aujourd'hui, elle a l'air mince mais en bonne santé, ses yeux rayonnant d'une vivacité qui peut être presque troublante quand elle vous fixe parfois avec un regard légèrement réprobateur. "Je n'aime pas vraiment ce que les journalistes font de ce que je leur dis", me dit-elle comme un avertissement, "mais ce n'est pas un problème et, de toute façon, ça fait une pause divertissante."

Le nouvel album de Hardy est une œuvre frontalement mélancolique avec ce timbre de voix qui interprète des chansons qui, de manière impressionniste et caractéristique, expriment l'amour perdu, le regret et la mort. « le temps s’accélère nulle part  », chante-t-elle sur Un seul geste, tandis que Train spécial et Le large sonnent comme des adieux mélancoliques. Est-ce un album sur le vieillissement ? « Pas intentionnellement », dit-elle après une pause, « mais, d'une certaine façon, oui, puisque c'est ce qui se passe. J'écris toujours sur les mêmes sujets, mais quand on a 74 ans, on devient plus réfléchie. En outre, on ne peut pas chanter le même genre de paroles que lorsqu'on avait 20 ou 30 ans. Ce serait en quelque sorte indigne. Pour certaines personnes, bien sûr, cela n'a pas d'importance, mais pour moi, ça l'est.

Texte original :

Hardy shot to fame in the mid-1960s with a million-selling debut single, Tous les garçons et les filles, a song whose chorus, I suggest, had that lyrical sonority she rates so highly. “Oh no!” she exclaims, looking momentarily horrified. “I was so young then and untutored. I did not know anything about this stuff. Absolutely nothing. Some of those early songs are just terrible. At that time, musical sophistication was really very far from my mind.” Nevertheless, the hit singles flowed throughout the decade, she released a dozen bestselling albums in France, and her face appeared on Paris Match and other magazines so regularly that she became the French cover girl of the 1960s.

Fifty years on, she still exudes a quintessentially French elegance. She is dressed in a simple black T-shirt and tailored black jacket over dark blue jeans. Her signature fringe and long hair having long since given way to a chic, snow-white bob, and a crimson silk kerchief offsets her ivory pale skin. There is a calmness about her that is palpable and perhaps spiritual – in response to my proffered hand, she responds with a Zen-like bow, her hands clasped together as if in prayer. She is a survivor in more ways than one, having come through a long battle with lymphoma that, four years ago, saw her taken to hospital in a coma after a fall. Her life hung in the balance for several weeks until, with her son’s permission, the doctors tried a new kind of chemotherapy. Last year, in a television interview, she spoke of her almost miraculous recovery with mixed feelings: “I regretted waking up because I almost had the death I was dreaming about. So the question I asked myself when I woke up was: ‘Why this reprieve?’”

Today, she looks thin but healthy, her eyes radiating a quizzical alertness that can be almost unsettling when she occasionally fixes you with a slightly reproving stare. “I don’t really like what journalists do with what I tell them,” she tells me as if by way of warning, “but it’s not a problem and, anyway, it makes for an entertaining break.”

Hardy’s new album is an unapologetically melancholic affair, that sonorous voice delivering songs that, in her characteristically impressionistic way, articulate love lost, regret and mortality. “Time is accelerating nowhere,” she sings on Un seul geste (A Single Gesture), while both Train spécial and Le large (Sail Away) sound like wistful goodbyes. Is it an album about growing older? “Not intentionally,” she says after a pause, “but, in a way, yes, since that is what is happening. I always write about the same subjects, but when you are 74 you become more reflective. Also, you cannot sing the same kind of lyrics as when you were 20 or 30. That would be somehow undignified. For some people, of course, it does not matter, but for me it does.”

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