mardi 25 décembre 2012

La musique ne peut pas tricher (1er extrait)

En 2005 Françoise Hardy accordait une interview à Cécile Wajsbrot pour la revue annuelle Fusées.

Cécile Wajsbrot : "L’ordre des chansons, dans un album, vous préoccupe-t-il ? Cela fait-il partie, pour vous, du travail artistique, est-ce vous qui en décidez ? Par exemple, dans le dernier, Tant de belles choses, on a le sentiment d'une progression, d'une sorte de lente descente, partant d'un apaisement donné (ou plutôt acquis, gagné) par la proximité de la mort pour revenir à la vie, et donc à la douleur, aux sentiments..."

Françoise Hardy : "L’ordre est capital : Ce qui le guide est avant tout la nécessité sinon que chaque chanson mette en valeur celle qui lui succède, tout au moins qu'aucune chanson n'écrase l'autre. Derrière une chanson aussi forte et aussi produite, avec autant de synthétiseurs que Tant de belles choses, par exemple, il fallait mettre une chanson d'un tout autre style tant sur le plan mélodique et rythmique que sur celui de la réalisation. La réalisation d' A l'ombre de la lune, une petite bossa nova pleine de charme, est minimaliste, mais assurée par de très bons musiciens.

Françoise Hardy

L'ensemble "tourne" remarquablement bien et tient donc la route derrière le poids lourd qu'est Tant de belles choses. Il ne fallait surtout pas mettre derrière ça Sur quel volcan ou Tard dans la nuit, deux mélodies fortes mais sous-produites avec des synthétiseurs et sans le "plus" qu'apportent en principe de bons musiciens. D’autres facteurs dictent l’ordre. Quand une chanson est trop différente du reste et n'a pas les qualités requises pour s'y intégrer, comme Côté jardin, côté cour, il vaut mieux la mettre en dernier, ou en premier, comme Tant de belles choses, dont la production ne ressemble en rien à celle du reste de l'album. Tant de belles choses est en premier parce que c'est une chanson forte. Coté jardin, coté cour en dernier parce que, comparativement, c'est une chanson faible. Aussi, quand une chanson est très lente et très triste, il vaut mieux qu'elle soit encadrée par des chansons un peu plus légères ou dynamiques. C'est ainsi que La folie ordinaire est encadrée par Grand hôtel et Un air de guitare. Ce sont donc uniquement des critères de nature musicale qui dictent l'ordre. Pour mon nouvel album, cet ordre s'est imposé de lui-même. Mais ce qui est évident pour soi ne l'est pas forcément pour les autres, en particulier pour les compositeurs. Jusqu'à présent j'ai toujours réussi à avoir le dernier mot."

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