Françoise Hardy : Saturne qui, en raison de son cycle de trente années, gouverne le stade adolescent, est la planète des interrogations, du doute, de la quête profonde du sens et de la finalité de toute chose. Mal vécue, cette fonction peut favoriser la mélancolie, la solitude, le sentiment profond et douloureux de l’aspect éphémère, vain, futile et, en fin de compte, absurde de toute chose...
Michel Houellebecq : C’est très schopenhauerien tout ça... Je vais être beaucoup plus "people" que vous : j’ai été projeté sur la scène médiatique alors que je n’avais exprimé que des doutes... Les gens m’aiment bien et j’ai donc trouvé une sorte de justification sociale à la solitude et aux doutes qui constituent le plus clair de mes écrits. Je suis quelqu’un d’authentique qui ne croit pas à ce que la plupart des gens croient et éprouve un certain plaisir à enfoncer le clou... Quand j’étais adolescent, j’avais un fort besoin de certitudes rationnelles, j’étais attiré par le savoir absolu, par la Science, par les mathématiques... Mon rêve n’était pas de devenir un grand écrivain mais un grand scientifique...
Françoise Hardy : Le Saturnien de haut niveau a souvent une éthique contraignante. Etes vous aussi rigoureux, intransigeant sur le plan existentiel que sur le plan intellectuel ?
Michel Houellebecq : Disons que je n’ai jamais dévié sur certains principes... (Cherchant) Je n’ai jamais fait de promesse non tenue... J’ai beaucoup de mal à mentir... Je ne peux pas laisser tomber les gens qui sont dans le malheur... Je suis tourmenté par la culpabilité, en particulier celle de n’avoir pu m’occuper de mon fils aussi bien que j’aurais dû...
Françoise Hardy : Une dominante Saturne-Pluton sur fond Poissons prédispose à avoir du mal à se motiver. On vous dit dépressif ?
Michel Houellebecq : Ce n’est pas le qualificatif qui convient. (Agacé) Il suffit que vous soyez fatigué et n’ayez envie de rien faire pour que les gens vous croient dépressif. En réalité, je suis extrêmement heureux de pouvoir rester couché pendant des jours sans rien faire d’autre que bouquiner... J’éprouve un vrai bonheur à regarder la mer ou un petit chien... Je peux me sentir très bien quand il ne se passe absolument rien. Je ne suis pas si dépressif que ça, j’ai juste besoin d’être seul.
Françoise Hardy : En quoi vous sentez vous encore adolescent ?
Michel Houellebecq : J’ai sans doute gardé certains traits de l’adolescence et ça explique en partie mon succès. Bien que n’étant pas jeune, je plais aux jeunes. Je ne peux pas expliquer pourquoi mais je sais que j’ai une image de jeune. C’est étrange... Comme Gainsbourg, j’ai peut-être devant moi un bel avenir de vieux jeune.
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